Le contexte du Carême 2022 : année de la famille et préparation au synode romain
Comme chaque année, le Carême nous offre un temps de ressourcement de notre foi en communion avec les chrétiens du monde entier. Nous y sommes encouragés par les catéchumènes qui se présenteront à l’appel décisif le 1er dimanche de Carême et s’engageront à se préparer d’une manière plus intense aux sacrements de l’initiation chrétienne à Pâques. J’appellerai ainsi 103 catéchumènes de notre diocèse, dont une majorité de jeunes de 18 à 30 ans, lors de la célébration du dimanche 6 mars à l’église Saint-Géry de Cambrai.
Le Carême 2022 est situé dans l’année de la famille qui se clôturera le 26 juin prochain par la 10ème Rencontre mondiale des familles à Rome en lien avec tous les diocèses du monde.
Le Carême a également comme cadre la préparation diocésaine du prochain synode des évêques en 2023 à Rome, qui a pour thème : "Pour une Église synodale : communion, participation et mission". Dans notre diocèse, l’équipe constituée de Madame Myriam Segond, de Monsieur Fabrice Gambier et du Père Bertrand Estienne, a déjà reçu plus d’une soixantaine de contributions individuelles ou collectives qui vont être relayées au niveau national.
Ces initiatives au niveau de l’Église universelle viennent éveiller notre conscience de la dignité et de la responsabilité reçues à notre baptême. L’évangéliste saint Luc qui nous accompagne en cette année liturgique, définit le disciple de Jésus comme son serviteur. À l’image de la Vierge Marie, il se tient à l’écoute de sa Parole (cf. Lc 1,38) et porte le souci de la justice en plaçant les pauvres au centre de ses préoccupations (cf. Lc 1,46-55). Le Carême comme chemin vers Pâques nous rappelle la finalité du service : la communion de joie en Dieu, et nous en indique l’itinéraire le plus sûr : la vie fraternelle en Église.
1. La vie en Jésus mort et ressuscité, finalité de notre vie de service
En début de Carême lors de l’appel décisif, l’évêque s’adresse aux catéchumènes en disant : « L’Eglise va célébrer la Résurrection du Christ dans la joie de Pâques. Voulez-vous y participer pleinement par le baptême, la confirmation et l’eucharistie ? ». Ce qui doit ainsi motiver les efforts de jeûne, de prière et de partage, c’est le désir de mieux vivre du Christ, de sa victoire sur toute forme de mal. Le Carême n’est pas une période triste, mais celle de l’entraînement pour mieux vivre de la joie de Pâques. Il nous y introduit par le travail nécessaire de purification et de renoncement et nous fait ainsi découvrir que notre existence de baptisés est pénétrée de l’amour de Dieu et ainsi définitivement orientée vers le Ciel.
Le Carême nous est offert pour retrouver un contact plus régulier avec la Parole de Dieu ; nous trouverons des soutiens avec le livret Donne-moi un quart d’heure et avec les propositions indiquées sur le site de notre diocèse. C’est également l’occasion de renouer avec la tradition du chemin de croix.
Le cheminement catéchuménal prévoit durant le Carême un certain nombre de prières. L’appel décisif et le rite des scrutins les 3ème, 4ème et 5ème dimanche sont intégrées aux célébrations communautaires, mais il y a encore les rites des traditions, de la reddition du Symbole de la foi et de l’Effétah qui peuvent être célébrés dans les groupes de préparation au baptême. Et tous ceux qui le désirent peuvent prier avec les textes de ces rites (Cf. Rituel de l’initiation chrétienne des adultes). Ils leur permettront de préparer la rénovation des promesses du baptême de la Vigile en partageant plus profondément la joie des nouveaux baptisés.
2. La vie en Église, soutien de nos missions
Le prochain synode qui a pour thème l’Église synodale invite à approfondir la communion qui caractérise l’identité de l’Église, la participation qui souligne la responsabilité de chaque baptisé, et la mission qui en indique la finalité, c'est-à-dire servir l’évangile du Christ.
Le Carême est une bonne occasion d’approfondir notre connaissance et notre attachement à l’Église, nous pouvons le faire en renforçant notre assiduité aux célébrations de l’eucharistie et du pardon. Les sacrements qui donnent accès au Christ et à son œuvre de salut, nous gardent dans la joie d’être membres de l’Église, son Corps vivant.
Je vous invite particulièrement à aller à la rencontre des prêtres pour recevoir le sacrement du pardon. Institué par le Christ le jour de sa résurrection (cf. Jn 20,23), il nous offre le pardon de Dieu qui désigne le don par-delà nos limites et nos péchés. Et ce don c’est le renouvellement de la grâce baptismale, de la vie de ressuscité.
Pour affermir notre lien à l’Église, nous sommes encore invités avec nos équipes, en paroisse ou en mouvement, à faire remonter les expériences et les réflexions à l’équipe diocésaine chargée de suivre le processus synodal.
Le Carême invite encore à prendre du temps pour mieux connaître la vie et la mission de l’Église. Des textes officiels comme le Document préparatoire au synode de 2023 ou l’article « je crois à la sainte Église catholique » du Catéchisme de l’Église Catholique peuvent nourrir notre réflexion (cf. site du Vatican : https://www.vatican.va).
L’attachement à l’Église passe également par une connaissance de figures qui ont marqué notre région. Nous pourrions durant ce Carême lire par exemple la biographie de Joseph Engling, séminariste allemand mort en 1918 sur le front près de Cambrai et rattaché à la famille spirituelle mariale de Schönstatt (cf. René Lejeune Joseph Engling et la spiritualité de Schönstatt Ed. du Parvis 1992) ou encore celle de Louise Nicolle, éducatrice et catéchiste des jeunes filles pauvres de Saint-Amand au 19ème siècle (cf. Françoise Lemaire. Louise Nicolle Pionnière d'œuvres sociales Ed du Moulin, 2012)
3. Le témoignage de la joie de l’Évangile, cœur de notre vie chrétienne
Par le baptême, nous sommes devenus des disciples missionnaires du Christ. Le Carême est l’occasion de laisser retentir en nous l’appel à la conversion de l’apôtre Paul, « Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Évangile » (1Co 9, 16).
En novembre dernier, j’avais publié le Message de fin de visite pastorale aux acteurs de la solidarité et de la charité. J’y propose un fil conducteur pour nos engagements et nos projets pastoraux : « Rien sans les jeunes, rien sans les personnes en précarité ». Ces deux groupes de personnes sont peu présents à nos activités paroissiales et diocésaines, notamment les étudiants et jeunes professionnels souvent par manque de temps et de disponibilité, les personnes précaires par la distance sociale et culturelle. Pourtant, l’Eglise en notre diocèse s’appauvrirait si elle ne cherchait pas à maintenir le lien avec le zèle et la créativité des jeunes et avec l’humilité et la spontanéité des pauvres.
Les temps du Carême et de Pâques sont marqués par une vie pastorale intense. Là où il n’est pas possible d’intégrer des personnes jeunes ou pauvres, puissions-nous au-moins avoir le réflexe de recourir à leurs avis dans l’élaboration et l’évaluation des activités.
Le geste de partage en faveur du CCFD (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement) ou d’organismes de charité plus locaux, est lié au temps du Carême qui appelle à la cohérence entre la parole et les actes, la foi et la charité.
Le Carême est une occasion pour aiguiser notre souci de la justice sociale dans nos lieux d’étude, de travail et de loisirs. Nous pourrions également nous interroger sur un engagement au niveau personnel ou collectif dans le domaine de la solidarité et de la charité comme nous y convie le Pape François dans son Message de Carême, Ne nous lassons pas de faire le bien (Ga. 6,9)
Ce temps correspond encore à la campagne électorale pour la présidence de la République. La Conférence des évêques de France vient de publier un document L’espérance ne déçoit pas, indiquant des repères et des pistes de réflexion. Il rappelle notre devoir d’électeur « qui demeure même dans des institutions toujours imparfaites et toujours perfectibles » (n.5) et nous invite à entrer dans le débat. Ne craignons pas de débattre entre nous et avec nos élus pour aider notre pays à maintenir les repères du respect de la vie et de la justice sociale, à soutenir les familles et à assurer un travail digne à tous.
Convertissons-nous et croyons à l’Évangile !
Le temps du Carême s’ouvre par la prière communautaire avec le rite de l’imposition des cendres. Deux versets bibliques sont proposés pour accompagner le geste : « Souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras en poussière » ou « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile ».
Si le premier verset tiré du Livre de la Genèse, rappelle notre condition mortelle et notre dépendance par rapport à Dieu, le deuxième reprend l’appel même du Christ à la conversion. Demandons à Dieu la grâce de reconnaitre notre condition de créature pécheresse et la grâce d’accueillir le salut en Jésus son Fils qui nous introduit dans une relation filiale avec Lui et fraternelle avec tout homme.
+ Vincent Dollmann
Archevêque de Cambrai