Heureux ceux qui ont soif de justice,
Dieu les ajustera à son cœur aimant
Ceux qui ont faim et soif de justice, désignent à la fois ceux qui sont engagés concrètement pour les droits élémentaires de respect de la vie et des personnes, et tous les croyants appelés à suivre le Christ. Ainsi, à la source de la faim de justice, il y a l’obéissance à la Parole de Dieu ; dans son jaillissement, il y a la mission de service qui doit allier justice et charité. Comme nous pouvons rattacher la béatitude des pauvres au conseil évangélique de la pauvreté, nous pouvons rattacher celle des affamés de justice au conseil évangélique de l’obéissance.
Dans la Tradition biblique, l’obéissance est le signe et le fruit de la foi. Jésus l’a vécue parfaitement pour nous y associer. Nous pouvons relever trois niveaux pour sa mise en œuvre en fonction de nos états de vie et de nos missions.
L’obéissance se réalise d’abord dans l’attachement à Dieu, dans l’accueil de sa Parole et de sa volonté. Certes l’engagement de foi dans notre société est difficile, mais entre le respect humain et l’opposition brutale, un chemin est possible pour vivre l’obéissance filiale et confiante à Dieu.
Tournée vers Dieu, l’obéissance est également attachement aux autorités terrestres, relais de l’autorité divine. Dans l’ordre naturel, le Nouveau Testament évoque au moins trois domaines : la famille, la société civile et le monde professionnel. Dans l’ordre surnaturel, il y a l’autorité dans l’Église, notamment celle du pape et des évêques au service de la vérité de l’Évangile et de la communion ecclésiale.
La Tradition indique les limites de ces autorités : elles ne peuvent pas s’exercer à l’encontre des lois divines ; le chrétien doit être capable de braver un ordre injuste pour obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes (Ac 4,19). De même, une autorité ne peut pas s’exercer en dehors de son domaine de compétences ; par exemple, des parents qui s’opposent à la vocation mûrement réfléchie de leur enfant, outrepasseraient leur autorité.
Et enfin l’obéissance s’exerce également l’un à l’égard de l’autre. C’est l’obéissance fraternelle qui est rappelée dans le sacrement de mariage lors de l’échange des consentements.
Si le service de la justice fait partie de la mission de chaque baptisé, il n’aura de vraie fécondité que dans l’obéissance filiale à Dieu. Le Christ nous y convie en nous assurant de la réussite malgré nos limites et nos péchés : « nous serons rassasiés ». Dieu nous rassasiera de sa justice, nous ajustera à son cœur qui aime et donne la vie. Alors, heureux seront nos cœurs affamés et assoiffés de justice !
+ Vincent Dollmann
Archevêque de Cambrai