Homélie du 3° dimanche de carême

3ème dimanche de Carême 15 mars 2020

En ce troisième dimanche de Carême, nous franchissons une nouvelle étape dans la préparation aux fêtes de Pâques. Après la liturgie de la Parole est prévu le rite des scrutins pour les catéchumènes qui ont été appelés au baptême en début du Carême. Le terme « scrutin » est à rapprocher du verbe scruter, il s'agit pour les catéchumènes de laisser Dieu « scruter leurs reins et leurs cœurs » (Ps 138), de le laisser prendre lentement toute sa place dans leur existence. Le rite du scrutin consiste en une prière et une imposition des mains pour demander la disposition des cœurs au don de Dieu.

Ce rite interpelle tous les baptisés sur leur soif de laisser Dieu les rencontrer et devenir leur ami et leur maître. L’évangile de ce dimanche se présente comme une pédagogie du Christ pour permettre à la Samaritaine d’accéder à la profondeur et à la beauté de la rencontre avec Dieu à tous ceux qui acceptent de répondre à sa main tendue.

L’évangile nous renvoie d’abord au cœur de la foi biblique et chrétienne : c’est Dieu qui fait le premier pas, c’est lui qui cherche à rencontrer l’humanité qu’il a créée et placée au sommet de sa création. Dans la rencontre avec la Samaritaine, Jésus manifeste et concrétise le désir de Dieu de rencontrer l’humanité et de lui offrir la vie de communion avec lui que le péché d’Adam a brisée. Ce désir, Dieu l’a révélé progressivement à travers Abraham qui a mis sa confiance dans la promesse d’une terre et d’une descendance et plus tard à travers Moïse qui a su conduire le peuple de l’esclavage vers l’alliance avec Dieu. Comme un père, Dieu prend soin du peuple allant jusqu’à l’abreuver en faisant couler de l’eau du rocher ; nous l’avons entendu dans la première lecture. Ce désir de la rencontre exprimé par Jésus au puits de Jacob se manifestera d’une manière inouïe dans une de ses dernières paroles sur la croix : « j’ai soif ». Ainsi dans son désir de rencontrer l’humanité, Dieu va jusqu’à laisser son Fils rejoindre les abîmes de la souffrance et de la mort. La croix révèle le prix que Dieu a payé pour venir à la rencontre des hommes. « C’est la preuve que Dieu nous aime » écrivait saint Paul aux Romains, dans la deuxième lecture.

La Samaritaine découvre cela progressivement. Elle se laisse d’abord surprendre par la liberté et la délicatesse de Jésus alors que les Juifs ne fréquentaient pas les samaritains.

Elle le reconnaît ensuite comme un prophète, un serviteur de la Parole qui scrute les cœurs pour les purifier et les renouveler. Grâce à Jésus, elle accepte de regarder sa vie en face et de la placer sous la Parole de Dieu. Elle rejoint ainsi la lignée des croyants qui accueillent le désir de Dieu de les rencontrer et de les accompagner.

Face à la cohérence de son enseignement et de son attitude, elle reconnaît Jésus comme le Messie, celui qui est habité par l’Esprit de Dieu et qui vient établir l’alliance entre Dieu et l’humanité. Avec les habitants de Sykar qui ont reçu son témoignage, elle ira jusqu’à proclamer : « Nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur » (Jn 4,42).

Ce parcours de la Samaritaine est un formidable appel à nous laisser rencontrer par le Christ jusqu’à vivre une rencontre personnelle, de personne à personne. Comme pour la Samaritaine, il nous laisse le temps de parcourir certaines étapes. Nous pouvons d’abord nous laisser surprendre par lui et nous attacher à lui d’une manière extérieure. Le Christ n’est cependant pas venu pour satisfaire une curiosité intellectuelle, mais pour nous rencontrer et nous introduire dans l’alliance de vie et de charité en Dieu.

En acceptant comme la Samaritaine de laisser Jésus regarder notre vie et la conduire dans son Esprit, nous serons étonnés de la paix et de la joie qui grandissent dans nos cœurs et nous trouverons l’élan pour en témoigner et entraîner d’autres dans cette expérience.

Une des prières litaniques proposées pour le rite des scrutins l’exprime avec justesse. Puisse-t-elle refléter notre désir, que nous soyons catéchumènes ou déjà baptisés :

« Comme la Samaritaine, qu’ils se laissent atteindre par le regard du Christ et puissent reconnaître leurs péchés.

Pour qu’ils soient libérés de l’esprit de méfiance qui fait abandonner le chemin du Christ.

Pour qu’en désirant le don de Dieu, ils aspirent de tout leur cœur à l’eau vive qui jaillit en vie éternelle.

Pour qu’en recevant le Fils de Dieu comme leur maître, ils deviennent de vrais adorateurs du Père, en esprit et en vérité.

Pour qu’après leur joyeuse rencontre avec le Christ, ils en portent la nouvelle à leurs amis et dans le monde ».

 

+ Vincent Dollmann

Archevêque de Cambrai

 

 

 

Article publié par communication Service • Publié le Lundi 16 mars 2020 • 700 visites

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