Homélie : Notre Dame du saint Cordon 2020

« Voici que je viens. J’habiterai au milieu de toi » (Za 2,14). Cette promesse est la réponse de Dieu à toutes les peurs de l’humanité et à toutes ses quêtes de bonheur. Au 7ème siècle avant Jésus-Christ, après les guerres et l’exil, le prophète Zacharie chante la fidélité et la proximité de Dieu en annonçant la restauration du pays à travers le don d’un roi et d’un grand-prêtre qui agiront selon son cœur. De fait, le courage du gouverneur Zorobabel et la piété du grand-prêtre Josué ont permis au peuple de retrouver une autonomie et un élan spirituel.

Mais l’expérience des déficiences et des infidélités des responsables a fait naître l’espérance de l’intervention directe de Dieu. Il y a répondu en envoyant son propre Fils conçu par son Esprit et prenant chair de la Vierge Marie. Vrai Dieu et vrai homme, Jésus a ainsi permis à l’Esprit de Dieu de s’habituer à la vie des hommes pour que ceux-ci s’habituent à la vie de Dieu. Il l’a réalisé à toutes les étapes de son ministère jusque dans l’épreuve d’une mort violente et injuste afin d’y porter la vie divine à toute situation humaine et d’accomplir ainsi la promesse de Dieu : « Voici que je viens, j’habiterai au milieu de toi ».

Comme pour en souligner la réalité concrète et tangible de la présence définitive de Dieu à nos vies, Jésus au seuil de sa mort a confié la Vierge Marie sa mère à saint Jean, son disciple bien-aimé.

Celui-ci nous a représenté et nous a indiqué l’attitude fidèle au testament de Jésus : prendre Marie chez soi. Quelques soient nos responsabilités dans la société ou dans l’Eglise, l’accueil de la Vierge Marie nous permet de répondre à la promesse de la présence de Dieu au monde et de l’expérimenter au quotidien. Elle nous garde dans l’humilité et l’espérance qui seules maintiennent ouvert un horizon de vie et de bonheur.

La Vierge Marie n’est pas un intermédiaire de plus entre Dieu et l’humanité, bien au contraire, elle est là pour nous faciliter l’accès et manifester sa victoire sur le mal et sa présence aux cœurs épris de justice et de paix.

Dans la nuit du 7 au 8 septembre 1008, quand les Valenciennois, réunis avec les autorités civiles et religieuses, veillaient pour implorer la fin de l’épidémie de peste, ils virent la Vierge Marie entourée des anges et des saints, tenant un cordon rouge dans ses mains. Ce cordon rouge renvoyait à la croix de Jésus le

Fils de Dieu qui a versé son sang pour rétablir par-delà le mal et la mort l’alliance définitive entre Dieu et l’humanité.

Vénérée comme l’arche d’alliance par l’Apocalypse dont nous avons entendu un extrait, Marie est là pour nous apprendre à accueillir humblement et concrètement la main aimante et salutaire de Dieu.

N’est-ce pas de cette confiance en Dieu agissant dans notre histoire, dont l’humanité a besoin pour se relever de l’épreuve de la pandémie actuelle ?

Au cœur de cette crise, nombreux sont ceux qui ont redécouvert des repères humains et spirituels pour gagner en qualité de vie : l’attention à l’intériorité et à la prière, le soutien précieux de relations simples en famille, les liens entretenus grâce aux réseaux sociaux, l’estime de tous les métiers même les plus humbles et l’engagement renouvelé pour la sauvegarde de la création.

Ce serait dommage et une erreur de tourner rapidement la page.

La crise sanitaire met l’humanité en face de ses responsabilités. Il y a urgence pour elle de renouer avec ses bases humaines et spirituelles.

Il n’y aura pas de prospérité si la relance économique ne met pas la personne au centre, mais continue d’être gérée par les spéculations financières.

Il n’y aura pas de justice, si la société oublie le sens sacré de toute vie humaine, mais continue de la manipuler et de sélectionner les forts au détriment des plus fragiles.

Il n’y aura pas de paix, si l’engagement écologique n’inclut pas tous les acteurs de la société, mais continue d’opposer entre elles, des catégories professionnelles ou des traditions culturelles.

Nous sentons bien qu’il faut un nouveau départ pour la société qui passe par une plus grande justice sociale, un respect inconditionnel de la vie humaine et une gestion durable des ressources de la terre.

Plus que jamais l’humanité a besoin de savoir que Dieu son créateur et son sauveur habite au milieu d’elle, promesse dont la Vierge Marie atteste l’accomplissement.

Si nous ne pouvons pas encore cette année-ci, aller en procession à travers la ville, nous pouvons néanmoins avec plus de ferveur chanter la Vierge Marie et en vivre au cœur de la cité : « Reine des cieux, ô Vierge tutélaire, nous célébrons votre nom, vos grandeurs. Entourez-nous d’un cordon salutaire : guidez nos pas, gardez nos cœurs ! ».

 

+ Vincent Dollmann

 Archevêque de Cambrai

Article publié par Service communication • Publié le Lundi 14 septembre 2020 - 13h58 • 577 visites

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