Réponses à des questions autour des célébrations diffusées sur les réseaux sociaux

La diffusion des messes via les réseaux sociaux a suscité un engouement important dans le diocèse et dans le monde entier. Les médias en ont donné un large écho. La retransmission d’une messe par la télévision et les réseaux sociaux n’est pas une nouveauté, rappelons que l’émission le Jour du Seigneur a fêté ses 70 ans. La durée du confinement et les incertitudes face à l’évolution de la pandémie installent ces transmissions dans une durée inhabituelle et suscitent un certain nombre de questions pastorales et spirituelles.

Quelle valeur donner à ces célébrations retransmises ?

Notre foi proclame que Dieu s’est fait chair en Jésus Christ. Par sa mort et sa résurrection, il n’a pas quitté notre humanité, mais il est présent d’une manière tout à fait unique. Sa mission se prolonge à travers celle de l’Eglise, il « travaille avec elle » (Mc 16,20). Cela, elle l’expérimente en célébrant l’eucharistie que le Christ a instituée avant sa passion et sa résurrection. Là, il se donne dans la Parole de Dieu proclamée et dans le sacrement de son corps et de son sang. Rien ne peut remplacer cette rencontre en Eglise avec le Christ. Mais sa présence agissante ne se limite pas aux sacrements, même si là, nous sommes certains de le rencontrer. Il peut utiliser d’autres médiations, notamment la Parole de Dieu, des rencontres et des événements, mais également les célébrations diffusées sur les chaines de télévision et l’ensemble des réseaux sociaux. Il est bon cependant de s’interroger si ces médiations creusent en nous le désir de se rassembler en Eglise pour célébrer le Seigneur, son Epoux et son Pasteur.

Quels biens spirituels pouvons-nous attendre ?

En assistant à des célébrations retransmises, nous pouvons accueillir les grâces du Seigneur que nous pouvons obtenir dans la communion spirituelle. Celle-ci est encore appelée communion de désir, car elle consiste par des actes de foi et de charité à grandir dans le désir de la communion eucharistique. Elle est ainsi une communion non sacramentelle, mais qui nous dispose à recevoir toutes les grâces que le Seigneur nous donne par la participation à l’eucharistie.

Cela nous rappelle que, la participation à l’eucharistie dans nos églises comme à travers un écran nous dispose à préparer nos cœurs, à adopter une attitude de foi

et de charité. Pour la messe comme pour tout sacrement, il n’y a pas d’automatisme. Si le Seigneur est présent réellement et personnellement dans les sacrements, s’il se donne à nous comme vrai Dieu et vrai homme dans l’eucharistie, il nous faut encore l’accueillir. Cela interroge la manière dont nous nous préparons aux célébrations. Prenons-nous au moins le temps d’une prière d’action grâce ou de louange, ou restons-nous dans l’agitation et la distraction ? Cette question vaut pour tous et en premier lieu pour les célébrants, les sacristains, les lecteurs, les choristes, les musiciens et les servants d’autel.

Quelles attitudes prendre en assistant à une célébration par écran interposé ?

La préparation spirituelle est première et essentielle, elle a besoin d’être soutenue par le cadre. Il est bon par exemple d’être attentif à placer un signe religieux près de l’écran, à veiller à la disposition des chaises et des fauteuils pour marquer la différence avec le visionnement d’autres programmes.

Les gestes du signe de la croix et l’attitude de silence sont primordiaux. Et si l’espace le permet, rien n’empêche de se mettre à genoux au moment de la consécration.

Il me paraît surtout important de participer aux célébrations par les réponses et les prières de l’assemblée et si possible, par le chant.

Pour maintenir la qualité de prière, que ce soit devant un écran ou à l’église, il faut éviter tout ce qui conduit à la distraction et veiller surtout à couper les téléphones.

A la fin de la transmission d’une célébration, nous pouvons reprendre avec le  Pape François la prière qu’il propose à l’issue de la messe du matin et au moment de bénir l’humanité avec le Saint-Sacrement:

« À tes pieds, ô mon Jésus, je me prosterne
et je t’offre le repentir de mon cœur contrit qui s’abîme dans son néant
en ta sainte présence.
Je t’adore dans le sacrement de ton amour, l’Eucharistie.
Je désire te recevoir dans la pauvre demeure que t’offre mon cœur ;
dans l’attente du bonheur de la communion sacramentelle,
je veux te posséder en esprit.
Viens à moi, ô mon Jésus, pour que je vienne à toi.
Puisse ton amour enflammer tout mon être pour la vie et pour la mort.
Je crois en toi, j’espère en toi, je t’aime. Ainsi soit-il. »

Que penser d’une adoration du Saint-Sacrement au travers de l’écran ?

Comme pour toute célébration, rien n’empêche la transmission d’une adoration eucharistique, par la télévision ou par internet. Mais il faut se rappeler comme pour la messe, qu’elle ne prend tout son sens que dans une église. Aussi l’adoration eucharistique filmée doit aider à creuser mon désir de l’adoration devant un tabernacle ou devant l’hostie exposée dans un ostensoir.

Il est bon également de se rappeler que la prière d’adoration est plus large que celle de l’adoration eucharistique. Dans l’Ancien-Testament, le terme hébreu a le sens de « craindre » qui ouvre à la profession de foi en Dieu : « Tu craindras le Seigneur ton Dieu, tu le serviras, c’est par son nom que tu prêteras serment » (Dt 6,13). Et dans le Nouveau-Testament, l’adoration désigne également une attitude concrète de reconnaissance et d’attachement à Dieu. En grec, le terme « adorer, proskyneô » signifie « se prosterner devant, s’incliner ». Dans l’évangile, des personnes prennent cette attitude devant Jésus : les Mages venus d’Orient (Mt 2,11), le lépreux (Mt 8,2) ou encore la femme cananéenne (Mt 15,25). Ainsi, adorer consiste d’abord à professer sa foi et à poser des actes de foi et d’amour envers le Christ. Un prêtre me disait qu’il serait bon d’inviter les chrétiens à se tourner de temps à autre dans la direction de l’église la plus proche et de son tabernacle, pour un acte de foi. C’est l’occasion de renouer avec la tradition des premiers siècles lorsque les chrétiens récitaient chaque jour le « Je crois en Dieu » en souvenir de leur baptême.

L’adoration eucharistique à travers un écran met encore davantage en relief la différence entre un visionnement en direct ou en différé. Seul le direct permet de se rapprocher des conditions d’une participation proche de celle que nous aurions à l’église.

Pour ceux qui organisent une exposition du Saint-Sacrement filmée, il est important de lire de courts passages de la Sainte Ecriture et de proposer des prières brèves et répétitives pour aider les participants à demeurer dans une relation concrète et personnelle avec Dieu.

Le 3ème dimanche de Pâques de l’année a propose comme évangile celui des disciples d’Emmaüs (Lc 24). Ils ont été pris par le découragement et la lassitude. Et voici que le Christ les rejoint, et leur ouvre un avenir d’espérance et de foi. Il leur indique même les lieux de renouvellement de leur fidélité, notamment, l’Eglise, la Parole de Dieu et les sacrements de la vie chrétienne (la réconciliation et la messe).

Après avoir retrouvé le goût de ces méditations, les disciples  retournent à Jérusalem dans la joie. Ils y retrouvent les apôtres qui vont attester : « C’est bien vrai, le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon ! ». Puisse l’expérience  

des disciples d’Emmaüs rejoindre également la nôtre en cette épreuve où la vie sociale et ecclésiale est mise à l’épreuve.

                                                                                              + Vincent DOLLMANN

                                                                                Archevêque de Cambrai

 

 Annexe : Benoit XVI, Exhortation apostolique sur l’eucharistie, Sacramentum Caritatis, 22 février 2007

Participation par les moyens de communication

57. En raison du développement formidable des moyens de communication, au cours des dernières décennies, le mot « participation » a acquis une signification plus ample que dans le passé. Nous reconnaissons tous avec satisfaction que ces instruments offrent aussi de nouvelles possibilités pour la célébration eucharistique. (176) Cela requiert des agents pastoraux de ce secteur une préparation spécifique et un vif sens de la responsabilité. En effet, la Messe transmise à la télévision prend inévitablement un certain caractère d'exemplarité. On doit donc être particulièrement attentif à ce que la célébration, non seulement se déroule dans des lieux dignes et bien préparés, mais respecte les normes liturgiques.

Enfin, pour ce qui concerne la valeur de la participation à la Messe, rendue possible par les moyens de communication, celui qui assiste à ces retransmissions doit savoir que, dans des conditions normales, il ne satisfait pas au précepte dominical. En effet, le langage de l'image représente la réalité, mais il ne la reproduit pas en elle-même. (177) S'il est très louable que les personnes âgées et les malades participent à la Messe dominicale par les retransmissions radiotélévisées, on ne pourrait en dire autant de celui qui, par ces retransmissions, voudrait se dispenser de se rendre à l'église pour participer à la célébration eucharistique dans l'assemblée de l'Église vivante.

 

Article publié par Service communication • Publié le Mercredi 29 avril 2020 • 1190 visites

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