Siméon-Marie Cardon
originaire du diocèse de Cambrai,
martyr de l’eucharistie
Un appel à approfondir notre foi eucharistique
En s’adressant aux pèlerins, le 18 avril dernier, le Pape François évoquait la figure du bienheureux cambrésien : « Hier, dans l’abbaye de Casamari, Siméon-Marie Cardon et cinq compagnons martyrs, moines cisterciens de cette abbaye, ont été proclamés bienheureux. En 1799, quand des soldats français se retirant de Naples saccagèrent des églises et des monastères, ces doux disciples du Christ ont résisté avec un courage héroïque, jusqu’à la mort, pour défendre l’Eucharistie de la profanation ».
Le martyre de ces religieux interpelle notre foi en la présence réelle et personnelle du Christ dans l’eucharistie, attestée par les Ecritures. Ainsi en rapportant l’institution de l’eucharistie, saint Paul écrit « Voici ce que j’ai reçu du Seigneur… » (1Co 11,23). Pour lui, l’eucharistie est une vérité de foi essentielle, aussi importante que celle de la mort et de la résurrection du Christ. La foi en Jésus eucharistie et la foi en Jésus mort et ressuscité sont intimement liés. C’est bien parce que Jésus est mort et ressuscité, parce qu’il est le Fils de Dieu qu’il peut faire ce qu’aucun être cher, même le plus proche, ne peut faire : se donner à travers le temps et l’espace. Dans l’eucharistie, nous pouvons le voir, le toucher, et mieux encore le manger, c’est à dire le prendre avec nous dans notre vie la plus intime.
L’adoration eucharistique, prière d’émerveillement
Pour approfondir la foi des chrétiens en l’eucharistie, la Tradition catholique a développé la prière d’adoration. Beaucoup de contemporains redécouvrent cette prière, notamment lors de veillées ; le Pape François n’hésite pas à y convier les jeunes.
L’adoration est ce temps d’émerveillement devant le Seigneur qui se donne à nous sous les humbles signes du pain et du vin. Ceux-ci manifestent l’amour de Dieu pour l’humanité que le Christ a signifié aux apôtres en prenant le tablier du serviteur pour leur laver les pieds. La stupéfaction des apôtres face à ce geste du Christ nous rappelle que l’homme n’aurait jamais inventé l’eucharistie ! Celle-ci porte la marque d’une sagesse déroutante et d’un amour fou. Bien que l’eucharistie s’inscrive dans la longue tradition du repas pascal juif, la nouveauté des paroles, « ceci est mon corps, ceci est mon sang », révèle une humilité et un abaissement qui ne peut avoir son origine qu’en Dieu.
L’adoration nous met ainsi en communion d’esprit et de vie avec la longue lignée des saints et tous ceux, vivants ou défunts, qui se sont laissé toucher par la présence du Christ. Lui que nous pouvons recevoir et adorer est Celui-là même qui a permis au bienheureux Siméon de témoigner de son amour sauveur. Blessé grièvement avec un sabre, le religieux affirmait ainsi : « Soumis à Dieu seul, je ne ferai rien pour abréger ma vie ou la prolonger. Je pardonne à ceux qui m’ont causé cette nuit d’expiation ».
L’adoration eucharistique pour fortifier la vie de communion
L’adoration n’est pas une prière intimiste, repliée sur elle-même, bien au contraire ! Elle nous permet consciemment, avec tout notre être, d’entrer dans le souffle d’amour de l’eucharistie, de nous laisser entraîner par le Christ qui ne cesse de tout recevoir du Père et de se livrer à Lui pour la vie du monde.
La Vierge Marie en est le modèle parfait. Ayant accueilli le Fils de Dieu en son sein par l’action de l’Esprit-Saint, elle n’a pas hésité à franchir les montagnes de Judée pour partager son bonheur de voir Dieu intervenir pour les hommes. Entrée dans la vie de communion en Dieu, elle nous apprend à demeurer fidèles à l’eucharistie et à en vivre. Le Pape Pie IX, recevant de l’évêque de Tarbes un tableau de Notre-Dame de Lourdes, lui disait : « Je mettrai ce tableau dans mon oratoire où je vais plusieurs fois par jour pour adorer le Saint-Sacrement. Et si mon âme est désolée, s’il me semble que Dieu est sourd à notre voix, je lèverai les yeux vers l’Immaculée ; elle priera avec nous, elle priera pour nous » ((G Betrin, Librairie Lecoffre, Paris, 1907, p. 83).
Cambrai, le 18 mai 2021
Edito juin 2021
+ Vincent Dollmann
Archevêque de Cambrai