« Comme ils sont beaux sur les montagnes, les pas du messager, celui qui annonce la paix, qui porte la bonne nouvelle, qui annonce le salut… » (Is 52,7). Isaïe est chargé d’annoncer au peuple la fin de son exil à Babylone dans l’actuel Iraq au 6ème siècle avant Jésus-Christ, qui aura duré plus de 50 ans. On peut imaginer la joie des survivants ; le peuple avait tout perdu, la terre don de Dieu et le Temple signe de sa protection. Isaïe parle à deux reprises de cris de joie. Cette joie était d’autant plus grande que le peuple y voyait l’intervention de Dieu dans l’autorisation du retour au pays par le roi Cyrus, vainqueur des Babyloniens. Pour le Peuple à travers l’alternance des princes, c’est en réalité Dieu qui régnait, bien plus c’est lui qui se manifestait comme le maître de l’Histoire.
Pourtant, cette joie inespérée des exilés du retour dans leur pays n’était qu’un avant-goût d’une joie plus grande encore et indépassable, celle de la venue du Maitre de l’Histoire dans l’Histoire, comme le proclame l’épitre aux Hébreux que nous avons entendue dans la deuxième lecture : « A bien des reprises et de bien des manières, Dieu, dans le passé a parlé à nos pères par les prophètes, mais à la fin, en ces jours où nous sommes, il nous a parlé par son Fils qu’il a établi héritier de toutes choses » (Hb 1,1-2).
Saint Jean a voulu ainsi introduire son Evangile par un cantique qui exprimait l’immense joie des premiers chrétiens qui reconnaissaient en Jésus, le Verbe de Dieu fait chair. Avec la naissance du Christ, sa mort et sa résurrection, Dieu a changé le cours de l’histoire ; malgré les apparences, le mal n’a plus le dernier mot. Dans toutes les situations humaines, le Christ nous a précédés avec un cœur tourné vers Dieu et les hommes pour rétablir entre eux le dialogue d’amour et de vie.
Si nous accueillons le message de Noël dans la foi, si nous ne nous arrêtons pas à la fête de la gastronomie et des cadeaux, mais si nous célébrons la fête de Jésus, le Verbe de Dieu fait chair qui porte la lumière de la vie divine au monde, alors la joie de Noël n’aura rien de superficiel, mais entretiendra en nous la lumière de l’espérance. Le psaume qui chantait la libération de l’esclavage en Egypte et le retour d’exil est pour nous en cette fête de Noël, le chant de la libération de tout mal et de l’accès à la vraie patrie, celle du ciel. Les paroles du psalmiste portent la joie à son comble, car en Jésus Dieu a réellement « fait connaitre sa victoire et révélé sa justice aux nations » (Ps 97,2). Cette joie ne nous sera plus enlevée car nous pouvons comme l’indiquait encore le psalmiste nous appuyer sur le socle de la fidélité de Dieu : « Il s’est rappelé sa fidélité, son amour en faveur de la maison d’Israël » (Ps 97,3). Par l’incarnation de Jésus son Fils, la fidélité de Dieu à Israël s’est étendue à toutes les nations.
Frères et sœurs, l’année sainte inaugurée hier dans la nuit de Noël à Rome par l’ouverture de la Porte-Sainte est également appelée « jubilé », c’est-à-dire « joie ». En choisissant l’espérance comme thème, le Pape nous invite à porter le regard sur les signes de la présence de Dieu dans notre monde. En son Fils Jésus, Dieu a manifesté concrètement sa fidélité comme le Maître de l’Histoire et le Pasteur de nos vies. Que la joie de Noël habite nos cœurs aujourd’hui et éclaire notre pèlerinage sur terre.