Homélie : messe des Rameaux et de la passion 2021

Le chant Victoire tu règneras, composé dans un camp de détention russe durant la dernière guerre mondiale, affirme dès la première strophe : « Rayonne sur le monde qui cherche la vérité. Ô croix, source féconde d’amour et de liberté ». En chantant ces paroles, nous proclamons que seule la croix de Jésus peut sauver l’humanité. Mais pour l’expérimenter, il nous faut encore suivre le Christ en vivant de son amour jusque dans les épreuves du mal.  Cela ne va pas de soi, comme l’indique le comportement des disciples de Jésus dans l’évangile.

Il y a d’abord l’obstacle de la logique ou de la sagesse humaine. Comment le Christ peut-il accepter la souffrance absurde pour nous sauver ? Lors de son reniement, Pierre déclare : « Je ne connais pas cet homme dont vous parlez » (Mc 14,71). Pierre reconnaît son incapacité à reconnaître le visage du Christ en Jésus humilié et condamné comme un bandit. Il avait appris au catéchisme que Dieu allait envoyer son Messie pour sauver le peuple avec puissance et éclats. Mais en confessant la pauvreté de son amour pour Jésus humilié, Pierre commence un cheminement de foi. Contrairement à Judas qui se laisse aller au désespoir, il pleure et entrouvre ainsi son cœur pour laisser l’amour de Jésus le toucher.

Un deuxième obstacle à côté de l’incompréhension face à la croix, est la peur de la souffrance et de la mort. Le récit selon saint Marc met en relief l’abandon de Jésus par ses disciples ; tous s’enfuient lorsqu’on vient arrêter Jésus. L’évangéliste va même mentionner un jeune homme auquel il semble s’identifier et qui « s’enfuit tout nu » (Mc 14,52). Saint Marc reconnaît que s’il avait été présent, il aurait suivi les apôtres en fuyant par tous les moyens.

En soulignant l’incompréhension et la lâcheté des disciples, l’évangéliste Marc indique que pour accueillir l’évangile de la croix, il nous faut nous appuyer sur la seule grâce de Dieu, sur son amour miséricordieux qui a rejoint notre misère pour nous en sauver. Comme saint Pierre lors de son reniement, nous pouvons quelles que soient nos chutes, faire l’expérience de cet amour sauveur en cherchant à convertir nos intelligences et nos cœurs et en accueillant la miséricorde de Dieu.

Au début de la Semaine Sainte qui nous convie à faire mémoire de la Passion et de la résurrection du Christ, laissons-nous guider par la Sagesse de Dieu. Pour cela acceptons de sortir de nos jugements hâtifs les uns par rapport aux autres et de nous laisser surprendre par ceux qui témoignent de la foi d’une manière différente de la nôtre. Acceptons de nous mettre davantage à l’écoute des Écritures et de l’Enseignement de l’Eglise.

En préparant les célébrations de la Pâque du Seigneur, nous voulons renouveler notre vie chrétienne à travers les sacrements de l’eucharistie et du pardon qui donnent accès à la vie divine jaillie de la croix de Jésus. Ce temps est particulièrement propice pour nous approcher du sacrement de la réconciliation, porte d’accès à l’amour de Dieu qui purifie, guérit et sauve.

Ne passons pas à côté de la croix du Christ et n’en ayons pas peur. Chantons en vérité, chantons par notre vie : « victoire tu règneras, ô croix tu nous sauveras !  Redonne la vaillance au pauvre et au malheureux. C’est toi notre espérance qui nous mènera vers Dieu ».

 

+ Vincent Dollmann

Archevêque de Cambrai

Article publié par Service communication • Publié le Mardi 30 mars 2021 • 1233 visites

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