En multipliant les pains, Jésus a manifesté la proximité inouïe de Dieu qui continue d’accompagner son peuple en pèlerinage sur cette terre.
Jésus y associe les apôtres et les prépare ainsi à entendre les paroles de la consécration lors de la Sainte Cène : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang, faites cela en mémoire de moi ». A travers le ministère des apôtres et de leurs successeurs - les évêques et les prêtres - Jésus renouvelle le geste de la multiplication des pains dans le sacrement de l’Eucharistie. Là il ne donne pas uniquement une nourriture pour le corps et l’âme, mais il se donne lui-même comme nourriture pour faire aboutir le pèlerinage vers le Ciel où Dieu nous a dressé la table du banquet éternel.
Frères et sœurs, laissons-nous émerveiller par le don de l’Eucharistie où le Seigneur Jésus se donne en nourriture pour notre vie, réellement et personnellement. Cet émerveillement peut devenir une attitude profonde de foi, si nous cherchons à développer un cœur d’adorateur.
La Fête Dieu est justement l’occasion de renouer avec la prière d’adoration du Christ eucharistie. Elle vient fortifier notre attachement à Dieu. « Adorer » dans la tradition biblique, signifie bien « professer sa foi ». Jésus lui-même au début de son ministère quand il est tenté par le diable, le rappellera avec force : « C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, c’est à lui seul que tu rendras un culte ! » (Mt 4,10).
Si l’adoration nous ancre dans la foi en la présence de Jésus dans l’Eucharistie, elle est aussi ce temps d’assimilation des dons reçus à l’Eucharistie et nous ouvre au cœur à cœur avec Lui pour le laisser faire son œuvre.
D’ailleurs selon l’étymologie du mot, « adorer » signifie « vers la bouche » (en latin : « ad-os »). Ce sens premier renvoie au geste des païens qui portaient leur main à la bouche des idoles. Pour nous, le mouvement est renversé ; c’est Dieu qui en Jésus son Fils veut nous toucher et nous communiquer son amour.
Pour en faire l’expérience, le silence de la prière est la condition essentielle, et c’est sans doute l’effort qui nous coûte le plus. Nous prenons rarement le temps du silence aujourd’hui : or, aucun amour ne s’affermit sans ces temps où nous pouvons nous réjouir de la présence de l’autre, où nous pouvons laisser résonner une parole qui nous soutient et nous fait vivre.
Le silence est le ciment de toute relation humaine d’amitié et d’amour, ceci est encore plus vrai pour notre relation à Dieu. Comme le rappelle l’Histoire Sainte, c’est dans le silence que Dieu a réalisé les grandes choses. C’est dans le silence sidéral, à l’aube du temps qu’Il a façonné le monde, c’est dans le silence du matin de Pâques, qu’il a ressuscité son Fils et fait jaillir la vie nouvelle.
Et c’est encore dans le silence de l’adoration qu’Il vient nous transformer à l’image de son Fils bien-aimé et nous communiquer la joie de pouvoir dire à sa suite : « Abba ! Père ».
Dans notre diocèse, de nombreuses communautés paroissiales et religieuses organisent des temps réguliers d’adoration. Ces deux-trois dernières années,avec le soutien des prêtres missionnaires de la Très Sainte Eucharistie, l’adoration perpétuelle a été placée au cœur des activités pastorales dans les villes de Maubeuge, de Cambrai et de Douai.
En prenant le temps de la prière d’adoration eucharistique, nous affermirons notre foi en sa présence vivante dans l’eucharistie, mais aussi notre vie de charité. La vraie prière d’adoration ne peut pas être une prière intimiste : si nous nous présentons dans un esprit humble et filial devant Dieu, celui-ci pourra travailler notre cœur et l’élargir aux dimensions de son propre cœur de Père qui a de la place pour tous les hommes.
En communiant tout à l’heure au Corps du Christ, puissions-nous réaliser la grandeur du don de Dieu. Que l’amen, le oui que nous disons et que le geste de communion, expriment le respect profond et l’émerveillement de notre cœur devant le Seigneur qui est là, pour moi, pour m’entraîner dans la vie de charité avec tous les hommes et de communion éternelle avec Lui.